mardi 11 octobre 2011

"Casino" de Leone Frollo (éd. Delcourt , coll.Erotix), 1

Voilà que la lecture de cette bande dessinée m'amène à rechercher la définition de la pornographie, puisque la série me semble d'un premier abord plus proche de ce genre que de celui d'un érotisme travaillé. Or, voici qu'un problème se présente :

-> Définition de la pornographie selon :

Larousse : Présence de détails obscènes dans certaines œuvres littéraires ou artistiques ; publication, spectacle, photo, etc., obscènes. 

Tlfi (Le Trésor de la Langue Française informatisé): Représentation (sous forme d'écrits, de dessins, de peintures, de photos, de spectacles, etc.) de choses obscènes, sans préoccupation artistique et avec l'intention délibérée de provoquer l'excitation sexuelle du public auquel elles sont destinées. 
 

Résumé de quatrième de couverture :

"Chez madame Georgette, tenancière d'un bordel Belle Époque, tapinent les plus belles filles de Paris.
"Dans la maison close" un ministre italien tente de passer une soirée incognito. Dans "Le Train bleu" deux vraies-fausses prostituées sont envoyées en mission très spéciale. Dans " La Dernière Vierge de Paris " un client fortuné recherche une âme pure dans un corps immaculé. Et si tout le monde était satisfait ? Casino est la série culte de l'immense Leone Frollo, surnommé le lion de Venise, l'égal de Manara et Crepax.
On lui doit de magnifiques dessins qui célèbrent les prostituées, les femmes fatales et les pin up. C'est la première fois que Casino paraît en France non censuré, en respectant le principe du format d'origine."

A noter que l'éditeur a mélangé les titres du deuxième et du troisième récit, ce qui est fort regrettable pour un travail de réédition soucieux d'une version fidèle et d'une reconnaissance de l'auteur.
L'ensemble est en tout cas fort ravissant, comme une douceur polissonne aux ébats certes parfois scabreux mais très fair-play. Bordel de luxe oblige ? C'est oublier la misère et la détresse cachées, le foutre et les regards injurieux qui pourraient échapper, la maladie et le corps exploité. Or, il n'est volontairement pas question de ces aspects-là, puisque chaque histoire se peint sur fond humoristique voire franchement burlesque, et pourtant semblant toucher un possible en chacun, ne délaissant pas les tabous par exemple scatophiles (la jeune fille pétomane à chaque coup de rein) ou les penchants décalés, où la honte du ridicule pourrait tuer toute désinhibition, joyeusement et lucrativement acceptée chez "One Two Two". Les filles y sont jolies selon les goûts de la mode et physiquement stéréotypés à la manière de Manara, ce qui donne un côté insipide à la soi-disant beauté des corps. Est-on alors dans la pornographie qui standardise selon les genres ? Pourtant, l'ensemble des acteurs dans ce milieu, d'autant plus lorsqu'il est issu de l'underground, peut paraître plutôt disparate avec des physiques allant de l'anodin au monstrueux, ceci étant favorisé par le fait que tout à chacun peut y contribuer en tant qu'amateur. Donc fausse polémique des standardisations ?
L'illustration - maîtrisée et classique - est chez Leone Frollo centrée sur les corps mis en scène mais ne reste pas centrée sur les organes génitaux, ce qui lui aurait sinon conféré, je pense, le statut pur et dur de "bande dessinée pornographique". Ainsi s'offre une touche de perversité amenée par de petites mises en scène. Mais il ne s'agit pas ici de s'attarder sur une quelconque crédibilité de caractère ou d'état d'âme, seulement sur des interrogations d'ordre pratique (la taille de ce monsieur monstrueusement nanti et la manière de pourvoir à son désir). Sympathique et réducteur, le fantasme est assumé et s'entretient à la variété des spécialités des prostitué(e)s et des désirs des clients - semble-t-il plus poussés dans le deuxième tome.
A développer : le fantasme de la maison close. Le désir d'être putain de luxe, le besoin de l'apparence, du regard, du désir purement sexuel, de l'attirance et des règles de jeu à maîtriser ; il faudrait mettre en scène plus de situations d'actes sexuels de l'avant à l'après dans tous ses aspects positifs et négatifs. Hommes et femmes, sommes-nous enclins naturellement à la soumission et au désir de domination destructrices ? Est-une tendance naturelle que notre esprit nous apprend à maîtriser voire à dépasser ? Et ce doux besoin de voyeurisme, masturbation de notre cerveau sexuel, plaisir de s'offrir par l'illustration et le texte à tous sans être ? Le désir et le plaisir sont-ils une aspiration à sur-être ?


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